jeudi 17 février 2011

Plop.





      Dernièrement, Cerise et Myrtille m’adressaient quelques regards déconcertés tandis que j’entreprenais le rituel matinale, à savoir l'entretien du superflu corporel. « Oh, je sais bien ce que vous vous demandez mes chères petites candides animales ! Je vous rassure, il est bien normal que vous ne compreniez pas ces poudres colorées et ces quelques autres pinceaux farfelus :  c’est chose là n’appartiennent qu’aux humains. D’ailleurs il serait bien trop ridicule que vous puissiez en faire de même ! Réfléchissez, voyons ! » Je crois que d’une certaine manière, elles étaient suffisamment intelligentes pour comprendre la fierté nauséabonde dont je m’étais parée. Cependant que je m’attardais sur les finissions pigmentées, je sentais le regard lourd des deux chattes se poser sur moi… « Eh bien ?  En voilà un regard hautain… Dis donc, c’est qu’il s’apparente à celui que je vous lance si souvent ! » J’ai cru presque entrevoir dans leurs yeux de félines, que je peinais d’ailleurs à imiter, bien que munie de nombreux fards, entrevoir dans leurs yeux disais-je, un certain acquiescement. 

  
     C’est alors que dans l’immédiat, j’entreprenais une réflexion sur l’inutilité de tout ces accessoires. « Mais bien sûr qu’elles ne comprennent pas ! C’est-à-dire qu’elles appartiennent toutes deux à l’intelligence suprême, celle qui s’extirpe, farouche, de tout cet engouement maladif que suscite la beauté, en ne lui accordant que la profonde indifférence que la vanité mérite. Ni plus, ni moins. » Ma réflexion si vive exigeait alors quelques sourires fiers et l’illusion d’un certain nombre d’applaudissements acharnés… Jusqu’à ce que je me surprise, dans un élan d’amour-propre absolu, dans le miroir réfléchissant. « C’est-à-dire, que tout cela me rend parfois si jolie, je ne voudrais pas délaisser tant de… D’ailleurs Bouddha disait lui-même qu’il fallait gouter au charnel et à la possession pour pouvoir s’en détacher… Alors pourquoi ne pas profiter encore un peu des plaisirs matérialistes ? Je finirais bien par les jeter par la fenêtre, m’entichant d’une rage passionnée allant à l’encontre de ce prosaïsme répugnant ! Non ? » Cerise n’avait pas tout à fait l’air de cet avis, étant donné le miaulement rageur qu’elle me lançait.


    « Oui, je crois que tu as raison. Tout ce superflue vise en fait à contredire la condition humaine, de même que t‘enfiler à toi quelques jupons serait des plus risible. Il me semble bien que nous sommes nés avec la plus grande médiocrité vestimentaire qui soit ! Médiocrité ? Que dis-je ? Avec le plus grand dénuement parfait dont nous devrions en fait nous contenter ! Je crois que tout cela m’arrache la sincérité pure dont ma mère m‘avait fait don lorsque, par césarienne, je m‘extirpais de son ventre joyeux. L‘apparence n‘appartient qu‘à ceux en ont besoin. Ceux qui se pensent l‘âme répugnante et le cœur indésirable…» Dans un ronron fracassant, Myrtille se frottait à ma jambe en signe d’affection. Subjuguée par tant d’amour, je l’étouffais de mes baisers baveux. Cependant, je remarquais sur son poils quelques taches rougeâtres que le pigment sanglant de mes lèvres avait laissé échapper. Dans un réflexe alarmé, j’interrompis l’étreinte et m’assurait que mes lèvres était tout aussi bien définie qu'avant. « Après tant de discours, tu te montres toujours aussi artificieuse ! Mais si seulement… Si seulement je parvenais à expliquer mon amour pour ces choses là. En fait, l’Homme est esthète et il me semble qu’il n’a fait que se plier, naturellement, à la fatalité coquette, qui, les dents blanches et parfaitement alignées, lui souhaitait la bienvenue dans ce monde répugnant qu’est celui de la superficialité. »



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